Quand on se tourne vers la société chinoise ancienne, on trouve deux traditions « philosophiques » qui jouent des rôles complémentaires : le Confucianisme et le Taoïsme. Généralement parlant, le premier concerne les conventions linguistiques, éthiques, légales, et rituelles qui fournissent la société de son système de communication. Le Confucianisme, autrement dit, s’occupe de la connaissance conventionnelle, et c’est sous la houlette duquel les enfants sont élevés pour que leur nature rétive et fantasque est faite à conformer à la couche draconienne de l’ordre social. Les individus définissent eux même, et leurs places dans la société en termes du formulaire confucéen.
Le Taoïsme, d’autre part, est généralement une poursuite des hommes plus âgés, en particulier, des hommes qui ont envie de se retirer de la vie active de la communauté. Leur retraite de la société est un genre de symbole extérieur d’une libération intérieure, une libération des bornes du dessin conventionnel de la pensée et de la conduite. Car le Taoïsme s’occupe de la connaissance non conventionnelle, de la compréhension directe de la vie, au lieu de la pensée représentative qui est abstraite et linéaire.
Confucianisme préside donc à la tâche sociale qui est nécessaire pour contraindre la spontanéité originale de la vie aux règles rigides de la convention, une tâche qui s’engage pas seulement du conflit et de la souffrance, mais aussi de la perte de la naturalité particulière et de la manque de conscience de soi pour lesquelles les enfants sont tellement adorés, et qui sont parfois regagnés par les saintes et les sages. La fonction du Taoïsme est de défaire le mal inévitable de cette discipline, et de non pas seulement restaurer, mais aussi développer davantage la spontanéité originale, qui est nommé self-so-ness (自然), ou la soi-ainsi-ité. Car la spontanéité d’un enfant reste toujours enfantine, comme tout le reste qui s’agit de lui. Son éducation encourage sa rigidité mais pas sa spontanéité. Dans quelques regards, le conflit entre la convention sociale et la spontanéité réprimée est si violent qu’il se manifeste dans la criminalité, l’insanité, et le névrose. Ce sont les prix qu’on paie pour l’ordre de la société, qui sont par ailleurs sans doute bénéfiques.
Mais il ne faut jamais, sous aucune circonstance, traiter le Taoïsme comme une révolution contre la convention, bien qu’il soit, de temps en temps, utilisé comme un prétexte pour la révolution. Le Taoïsme est une voie à la libération qui n’arrive jamais par la moyen de révolution, puisqu’il est notoire que la plupart de révolutions établissent des pires tyrannies qu’elles détruisent. Être libre de la convention, cela ne signifie pas la refuser, mais ne pas être dupé par elle ; cela signifie d’être capable de l’utiliser comme un instrument au lieu d’être utilisé par elle.
L’occident n’a pas une institution reconnue qui correspond à Taoïsme, puisque notre tradition spirituelle Judéo-Chrétienne identifie l’Absolu, le Dieu, avec la convention de l’ordre moral et logique. Cela, on peut bien prétendre, est une catastrophe culturelle majeure, car elle pèse l’ordre social d’une autorité excessive, invitant le genre des révolutions contre la religion et la tradition qui sont caractéristiques de l’histoire occidentale.
Se sentir en conflit avec les conventions socialement sanctionné, déjà c’est un problème ; mais ce serait un problème beaucoup plus grave, un problème de tout d’autre niveau, si on se sent en conflit avec la racine et la fondation même de la vie, avec l’absolu même. Ce dernière sentiment nourrit un sens de péché si grotesque que, les seules solutions qui restent, c’est soit de renier sa propre nature, soit de renier le Dieu. Puisque le premier est, ultimement, impossible - c’est comme ronger ses propres dents, le deuxième devient inévitable, quand les palliatifs tel que le genre confessionnel ne suffisent plus.
Comme dans la nature de toutes les révolutions, la révolution contre le Dieu donne place à la pire tyrannie de l’état absolutiste : il est pire parce qu’il ne peut même pas pardonner, et parce qu’il reconnaît aucun pouvoir hors de sa juridiction. Puisque même si le dernier est vrai de Dieu, théoriquement parlant, ses représentants à terre, l’église était toujours prête à admettre que, bien que les lois de Dieu étaient immuables, personne ne peut prétendre nommer la borne de sa mercie. Mais quand le trône de l’Absolu devient vacant, le relativisme l’usurpe et commet l’idolâtrie véritable, la vrai indigne contre le Dieu : l’absolutisation d’un concept, une abstraction conventionnelle. Mais il serait peu probable que le trône soit devenu vacant si, dans un sens, il n’avait pas déjà ainsi : si la tradition avait eu quelques façons d’ accéder à l’absolu directement, sans les termes de l’ordre conventionnel.
Bien sûr que le mot «l’Absolu» même nous suggère quelque chose abstraite et conceptuelle, telle que « l’être pure ». Notre idée même de l’esprit (en tant que l’opposé de la matière) semble avoir plus d’affinité avec l’abstrait qu’avec le concret. Mais avec le Taoïsme, tout comme avec d’autres voies de libération, il ne faut jamais mêler l’Absolu avec l’abstrait. D’autre part, si on dit que Tao, la réalité ultime, est le concret plus que l’abstrait, il mènerait à peut-être encore plus de confusions, puisque nous somme accoutumés d’associer le concret avec le matériel, le physiologique, le biologique, et le naturel, plutôt qu’avec le supernaturel. Mais du point de vue Taoïste et Bouddhiste, tout ça sont encore des termes pour la connaissance de la sphère conventionnelle et abstraite.